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Yémen : Nouvel échec à Maarib pour la coalition et reprise du dialogue politique compromise

15-09-2015 07:15  Contribution
Par Houria Ait Kaci
La spectaculaire opération contre les troupes terrestres de la coalition arabe à Safer, à Maarib » (Est du Yémen) le 4 septembre, et rééditée aujourd’hui 13 septembre, a stoppé l’avance de celles-ci vers la capitale Sanaa (Nord) où les missiles des forces yéménites sont pointés sur les villes saoudiennes, dont la plus proche, Abha, se trouve à un jet de pierre de Sanaa. Plusieurs positions saoudiennes aux frontières au Nord Yémen à Jezane, Assir et Nejrane, sont déjà aux mains des forces yéménites. Ce contexte favorisera t-il la reprise du dialogue pour la paix au Yémen où la situation humanitaire est plus que jamais catastrophique depuis l’intervention aérienne le 26 mars par l’Arabie Saoudite à la tête d’une coalition arabe soutenue par Washington ?
Mais d’ores et déjà la reprise du dialogue sous l’égide de l’ONU semble compromise après l’annonce par le Président démissionnaire en exil à Ryad, Abd Rabbo Mansour Hadi, ce 13 septembre, de conditions préalables aux discussions avec Ansar Allah, (Houthis), l’ancien président Ali Abdallah Saleh et leurs alliés, par la reconnaissance et l’application de la résolution 2216 du Conseil de sécurité de l’ONU qui prévoit l’évacuation par les forces d’Ansar Allah (Houthis) des villes sous leur contrôle.
1- Volte face de Hadi
Or l’annonce de la reprise du processus du dialogue politique faite le 10 septembre par l’émissaire spécial de l’ONU pour le Yémen, Ismaïl Ould Cheikh, faisait état de discussions sans conditions préalables et il s'était même félicité de l'engagement du Gouvernement du Yémen, des Houthis et du Congrès général du peuple à se joindre aux pourparlers de paix.
Ould Cheikh Ahmed a annoncé la tenue "la semaine prochaine dans la région" de nouvelles "négociations de paix" qui porteront notamment sur "un cessez-le-feu et la reprise d'une transition politique pacifique", et « viseront aussi à "créer un cadre pour un accord sur un mécanisme permettant d'appliquer la résolution de l'ONU 2216", selon un communiqué du médiateur publié à New York après s'être adressé par vidéoconférence depuis Ryad à une réunion à huis clos du Conseil de sécurité.
« Ces pourparlers visent à créer un cadre pour un accord sur les mécanismes de mise en œuvre de la résolution 2216 du Conseil de sécurité des Nations Unies, un cessez-le-feu et la reprise d'une transition politique pacifique, conformément à l'initiative et au mécanisme de mise en œuvre du Conseil de coopération du Golfe et des résultats de la Conférence de dialogue nationale » selon l’ONU.
Le 12 septembre « le Conseil de sécurité de l'ONU s'est félicité de l'annonce par l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, Ismail Ould Cheikh Ahmed, de pourparlers de paix qui devraient avoir lieu bientôt et a encouragé les parties au conflit à y participer ». Le Conseil a ajoute dans une déclaration à la presse publiée vendredi soir : « les membres du Conseil ont salué la décision du gouvernement yéménite de participer à ces pourparlers qui devraient avoir lieu dans la région avant la fête religieuse de l'Aïd al-Adha, aux alentours du 23 septembre » et ont «  une nouvelle fois appelé les parties yéménites au conflit à participer aux pourparlers annoncés et à d'autres pourparlers similaires à l'avenir et à s'impliquer sans conditions préalables et de bonne foi”.
Comment se fait t-il que 24 heures après cette annonce de l’ONU, le Président Mansour Hadi, allié de Ryad, soit revenu sur sa décision et fasse volte-face ? Cette position ne vise t- elle pas à bloquer tout retour au processus de paix, en exigeant en quelque sorte une reddition sur le terrain des forces yéménites opposées à l’intervention saoudienne. Ce qui pose la question de savoir qu’elles seraient alors les forces qui les remplaceraient et combleraient le vide qu’elles laisseraient pour sécuriser les villes. Al Qaida comme à Aden ? Depuis le retrait d’Ansar Allah, (Houthis) à la mi-juillet de cette ville, ce sont les takfiristes qui ont pris leur quartier et ni les partisans de Hadi, ni leurs alliés, ni les militants du mouvement séparatiste du Sud, n’ont pu les empêcher ou voulu les affronter, ont relevé les observateurs.
Quelles sont les garanties offertes aux forces yéménites pour qu’Al Qaida ne vienne pas occuper ces territoires après leur départ comme à Aden ? C’est la question « cruciale » à laquelle devait répondre ces pourparlers, pour trouver « un accord sur les mécanismes de mise en œuvre de la résolution 2216 du Conseil de sécurité des Nations Unies » qui puisse garantir un retour définitif à la paix. En bloquant ainsi les pourparlers de paix, le Président Hadi et son allié Ryad, cherchent t-ils encore à gagner du temps et provoquer un effondrement total du Yémen ? Les plus jusqu'auxboutistes  auraient pris le dessus à Ryad ?
2-Nouvel épisode de la bataille de Maarib 
Sur le terrain des opérations militaires, la bataille pour le contrôle de Maarib, se poursuit, après le succès de l’opération spéciale des forces de l’armée yéménite soutenue par les comités populaires, le 4 septembre, qui a provoqué une onde de choc dans les rangs de la coalition qui a subi de nombreuses pertes et la destruction d’un grand nombre de blindés, d’avions et d’hélicoptères Apache de l'armée émiratie », selon l’agence officielle SABA. « Des dizaines de militaires émiratis et saoudiens ont été tués dans l’attaque au missile balistique Toshka des forces yéménites contre la base de la coalition saoudo-américaine, dans la région pétrolière de Safer, dans le gouvernorat de Marib » (Est du Yémen) et la base incendiée et détruite, selon la même source.
Cette opération a fait subir de lourdes pertes à la coalition et ses alliés locaux, au cours de laquelle pas moins de 300 militaires saoudiens, émiratis et bahreïnis ont été tués, selon des sources militaires yéménites alors que la coalition a annoncé un bilan moins élevé et a permis de stopper l’avancée des troupes terrestres de la coalition vers la capitale SANAA.
Le porte-parole de l’armée yéménite le général de brigade Sharaf Luqman, cité par la chaîne satellitaire Al-Mayadeen, a averti après cette opération que « la coalition des assaillants sera surprise dans les prochains jours », ajoutant que : « L’armée et les comités populaires yéménites ont prévu des scénarios pour les pires situations. Nous avons organisé nos forces et nos armements dès le début de l’agression». Il a également souligné : « L’équilibre de forces militaires n’est pas en notre faveur mais les tactiques de l’armée et des comités populaires yéménites ont ébranlé la suprématie des agresseurs ».
Selon des experts militaires arabes et Yéménites, "la base 107 a été touchée par plus d'un missile", dont " le missile Toshka » qui a une portée de 70 kilomètres, une ogive explosive de  600 KG, un   système de guidage interne qui suit les reliefs de la terre" et aussi par des missiles fabriqués par la Corée du Nord, selon l’analyste yéménite Ali El Khoulani.
Selon Moujtahed, le tweeter saoudien, cité par le site Al Manar : " Les Américains ont informé l'Arabie Saoudite de l'existence de missiles à longue portée  chez les Ansarullah plus dangereuses que ceux qui ont frappé le camp 107", ajoutant que " le mouvement Ansarullah possède 30 missiles balistiques de type "BM25 MUSUDAN" fabriqués par  la Corée du Nord", dont « il n'a pas encore fait usage contre des villes saoudiennes car cela aura de graves répercussions, mais que le recours à ce genre de missiles stratégiques sera "la dernière option de Samson" c'est-à-dire qu'il n'y aura plus rien à perdre".
Or, selon les toutes dernières informations, une autre tentative de la coalition a été déjouée ce 13 septembre par l’armée régulière et les comités populaires yéménites qui ont réussi à bloquer la progression des forces d’Abd Rabbo Mansour Hadi, vers la localité de Hama al-Massariay, à Maarib, où, selon la chaîne Al-Mayadeen de violents affrontements opposent les forces d’Ansar Allah (Houthis) aux miliciens pro-Hadi, soutenus par la coalition saoudienne.
L’armée régulière et les comités populaires ont bloqué la progression des « mercenaires » , au sud ouest de la ville de Maarib, détruisant neuf véhicules blindés appartenant aux Émirats arabes unis et à l'Arabie saoudite et tuant un certain nombre parmi leurs soldats et capturé un certain nombre d'éléments terroristes faits prisonniers, rapporte SABA, qui ajoute qu’ hier 12 septembre, les forces yéménites ont tiré des missiles « en direction des positions d’Al-Qaïda et des mercenaires saoudiens », dans la province de Maarib, faisant parmi eux, des dizaines tués et 25 autres blessés, selon Saba.
Une dépêche de l’’AFP annonçait ce matin que : « Les forces yéménites pro-gouvernementales, appuyées par la coalition arabe conduite par l’Arabie saoudite, ont lancé dimanche (13 septembre) une « vaste » offensive terrestre contre des positions rebelles dans la province de Marib (centre), citant une source militaire qui précise que « cette offensive est la plus vaste et la plus puissante depuis le début (en août) de notre opération militaire dans la province de Marib » et qu’elle « est appuyée également par des hélicoptères d’attaque Apache et des avions de combat de la coalition. Quelque 12.000 militaires pro-gouvernementaux ont participé à un défilé au quartier-général de la 23e brigade mécanisée à Al-Aber avant le début de l’offensive ».
3- La route vers Sanaa est loin et les villes saoudiennes se rapprochent du viseur des forces yéménites
La route semble encore longue pour la coalition avant d’atteindre Sanaa, via Maarib et Taiez où de violents combats se déroulent toujours et où les bombardements de la coalition sont devenus intensifs tout comme SANAA soumise à un déluge de feu, enregistrant des dizaines de raids quotidiens, ciblant des civils, des maisons d’habitation, des centrales électriques, des facultés dont la faculté de  l’aviation et même  le siège de la TV et Radio publiques.
Par ailleurs, les forces yéménites, selon les options stratégiques arrêtées, tout en défendant l’Est et le Nord du pays poursuivent leur progression à l’intérieur des frontières de l’ennemi, par les attaques aux missiles des régions de Assir, Najrane et Jezane.  Selon les dernières nouvelles en provenance du front yéménite, le 12 septembre, à Al-Raboua, à Zahran, les forces yéménites ont pris le contrôle de quatre check-point et tiré des missiles Grad sur la caserne de Najran et sur la base militaire d’Al-Khoudjara, à Jezan. Les forces yéménites ont pris le contrôle des localités de Ghachya, de Vafaya, de Sahwa. Des dizaines de militaires saoudiens ont été tués et blessés, des tours de contrôle incendiées et 17 véhicules blindés détruits, selon la radio IRIB.
Si la route qui mène vers SANAA est encore loin, celle qui mène les villes saoudiennes semblent se rapprocher du viseur des missiles de l’armée yéménite. La première ville saoudienne à la frontière yéménite est seulement à quelques 150 kms. C’est dire que l’Arabie Saoudite a perdu sa profondeur stratégique. Ce qui est loin de faire l’unanimité au sein du royaume des Al Saoud où l’agression du Yémen voisin est critiquée.
Ainsi, l’appel « Urgent » publié par le célèbre tweeter saoudien Mujtahed " adressé aux 13 princes fils et petits fils du fondateur du royaume AbdelAziz AlSaoud, interroge : « Pourquoi accepter une politique étrangère qui remette en question la confiance de nos gens en nous et qui fasse retourner les peuples contre nous? Et pourquoi avions-nous accepté de prendre des risques militaires non-calculés comme l'alliance militaire pour attaquer l'Irak, la Syrie et la guerre au Yémen ? »
Par Houria Ait Kaci journaliste


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