Algérie 1

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Une politique de l’emploi cohérente en Algérie, condition d’un fort taux de croissance

04-11-2016 15:40  Pr Abderrahmane Mebtoul

 Le constat est que certains responsables vivent encore l’’ère matérielle des années 1970, pouvant conduire le pays droit au mur sans vision  stratégique s’adaptant au nouveau monde. Par ailleurs, les  organismes chargés de l’investissement et l’emploi agréent un maximum de projets avec de nombreux avantages financiers et fiscaux. Or, il convient de se demander si ces projets  s’insèrent dans une vision globale du développement du pays, s’ils concernent des segments porteurs de croissance durable ou ne s’assimilent-ils pas à un replâtrage ? L’Algérie selon les observateurs internationaux ,où j’ai été invité personnellement  le 02 novembre 2016 à Alger à un large en tant qu’expert indépendant  avec la  délégation du Parlement européen (PE) à Alger présidé par M. Antonio Panzeri, Président de la Délégation pour les Relations avec les Pays du Maghreb, a toutes les potentialités, sous réserves de profondes réformes ,  pour asseoir une économie  diversifiée garante de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine .

1- Sachant que le secteur industriel représente moins de 5% du produit intérieur brut(PIB), que sur ces 5% les  PMI/PME qui constituent plus de 95% du tissu productif algérien sont en difficultés (bureaucratie, système financier  sclérosé, système socio-éducatif non adapté ,  foncier,) en plus de la  concurrence de la sphère informelle produit de la bureaucratie qui contrôle 40% de la masse monétaire en circulation, il convient de se demander si les jeunes promoteurs agrées par l’ANDI, l’ANSEJ et d’autres organismes chargés de la promotion de l’emploi, ont la qualification et surtout l’expérience nécessaire pour manager les projets, à l’instar de ce qui se passe partout dans le monde, diriger une entreprise dans un cadre concurrentiel afin d’avoir des prix /coûts compétitifs. Le risque n’est-il pas d’assister à un gaspillage des ressources financières en fait de la rente des hydrocarbures et à terme au recours au trésor à l’instar de l’assainissement des entreprises publiques ? Comme on le constate actuellement pour la SNVI et  El Hadjar  véritable gouffres financiers, dont le collectif réclame la présence du Ministre  de l’industrie,  malgré ses promesses euphoriques   publiques induisant en erreur les plus hautes autorités du pays,  qui avait promis la résolution de tous les  problèmes entre 2014/2015. Car l’actuelle politique industrielle, sans cohérence   se fonde  sur l’ère matérielle des années 1970 ( fer-ciment)  croyant que c’est la   solution miracle, oubliant que le monde s’oriente vers de nouvelles technologies économisant le  fer et le ciment, segments contrôlés au niveau mondial actuellement par cinq  firmes internationales, étant impossible d’exporter surtout en Afrique, sans un partenariat étranger fiable. La trajectoire raisonnable, en attendant une véritable relance des segments hors hydrocarbures, n’aurait-elle pas été l’investissement le plus sur dans l’acquisition du savoir faire par une formation additionnelle et des stages pour les préparer sérieusement à l’insertion dans la vie active durablement ? Comment ne pas rappeler que selon les données officielles   pour ce qui est de la répartition des projets par secteurs, ANSEJ notamment,  c’est celui des transports qui a attiré le plus d’investissements  suivi de prés par le secteur du bâtiment, des travaux  publics , suivi de loin moins 15/20% par  le  secteur de l’industrie  celui de l’agriculture avec un faible investissement direct étranger IDE hors hydrocarbures au niveau des segments productifs permettant la concurrence  internationale, se concentrant essentiellement sur le marché intérieur , nombre  insignifiant en comparaison de ce qui est enregistré chez nos voisins et surtout, en rapport avec le potentiel national et des efforts gigantesques en investissements publics. Les grandes firmes choisissent de s’installer chez nos voisins et vendre chez nous. La LFC 2009   dont la règle  généralisée des 49/51%  est jugée trop protectionnistes par les investisseurs étrangers  a freiné l’élan aux IDE  notamment des PMI/PME. D’une manière générale, les résultats des organismes chargés de l’emploi (ANDI l’ANSEJ, le CNAC-) en référence aux projets réalisés et non en intention  sont mitigés malgré les nombreux avantages accordés. Comme selon certaines sources, plus de 50% des projets réalisés sont abandonnés après avoir bénéficié des avantages accordés et les nombreux litiges auprès des banques de non remboursement l’attestent.

2.-Or, avant de lancer dans une opération couteuse à terme pour le pays  et sans analyser sa rentabilité en dynamique au vu des nouvelles mutations technologiques et managériales mondiales, un bilan serein implique de répondre à dix questions et ce d’une manière précise et quantifiée :

-quel est le bilan de l’ANDI- CNAC , ANSEJ depuis leur existence dans la réalisation effective de ces projets et non de dossiers déposés et le statut juridique ;

-quel est le temps imparti pour les projets réalisés entre le moment du dépôt et la réalisation effective le principal défi du XXIème siècle étant la maîtrise du temps ;

-pour les projets réalisés combien ont fait faillite selon les règles du code de commerce ;

- quelle est la part en devises et en dinars des projets réalisés en  dressant  la balance devise ;

-quel est le niveau d’endettement bancaire des projets réalisés avec le montant des créances douteuses ;

- la ventilation des crédits bancaires par projets ;

-quel est le montant exact des avantages fiscaux accordés tant pour les projets que ceux réalisés ;

-la ventilation des postes de travail avec le niveau de qualification des projets et ceux créés dans la mesure où le développement du XXIème siècle repose sur la valorisation du savoir ;

- quelle est la contribution à la valeur ajoutée réelle du pays des projets réalisés ;

- ces projet et ceux réalisés s’insèrent –ils dans le cadre des valeurs internationales dans la mesure avec la mondialisation, malgré la crise, nous sommes dans une économie ouverte du fait des engagements internationaux de l’Algérie.

3.-Concernant l’aspect macro-économique global, il existe une loi universelle : le taux d’emploi est fonction du taux de croissance et des structures des taux de productivité relevant d’entreprises compétitives à valeur ajoutée. L’on ne crée pas des emplois par décret, la solution de facilité étant la création d’emplois dans l’administration. Le taux de chômage officiel de 11% est fortement biaisé incluant les sureffectifs tant de administrations que des entreprises publiques, des emplois temporaires fictifs ( 5 mois non créateur de valeur ajoutée comme par exemple pour faire et refaire des trottoirs) et les emplois dans la sphère informelle. .Paradoxalement du fait de l’allocation sectorielle d’investissement via la dépense publique, fortement biaisée privilégiant les emplois à très faibles qualification comme le BTPH (70% de la dépense publique), les diplômés ont plus de chance d’être chômeurs expliquant le faible taux de croissance et de productivité.. Il faudra créer entre 300.000/400.000 postes de travail par an entre 2017/2020, qui s ‘ajoute au taux actuel  du chômage ,sous estimée ,  du fait de la pression démographique, de l’entrée sur le marché du travail de la population féminine  sous estimée  dans les statistiques,  afin de résoudre le lancinant problème du chômage ? et  deviendront les 2 million d’étudiants sortis des universités entre 2018/2020 ? Dès lors se pose cette question stratégique : cette faiblesse du dépérissement du tissu productif en Algérie n’explique t- elle pas que le taux de croissance n’est pas proportionnel à la dépense ? Doit-on continuer dans cette trajectoire où les dépenses ne sont pas propositionnelles aux impacts ? Aussi, pour se faire une idée du bilan nécessaire et afin de dépasser l’entropie actuelle, il ya lieu d’évaluer l’impact de la dépense publique :

-sur le taux de croissance, le taux de chômage et le pouvoir d’achat des citoyens

-réaliser des  enquêtes fines mettant en évidence la répartition du revenu et le modèle de consommation par couches sociales pour déterminera l’indice de concentration en termes réels et non fictifs et selon une vision dynamique à moyen et long terme

-la part des marchés octroyés aux nationaux (privé et public), en distinguant également l’autofinancement et les emprunts auprès des banques et surtout leurs capacités de réalisation,

-de distinguer au sein des investissements nettement la partie devises et la partie dinars ;

-la part des marchés octroyés aux étrangers (ont-ils contribués à l’accumulation du savoir faire organisationnel et technologique ou est ce des contrats clefs en main) avec leur apport en fonds propres et la part couverte par les banques algériennes ;

-le montant du flux de l’investissement direct étranger plus les  transferts de capitaux vers l’Algérie, le seul document opératoire étant la balance de paiement

- la sortie de capitaux en dehors de l’Algérie ;

4.- Tout en n’ayant pas une vision essentiellement négative, beaucoup de réalisations mais beaucoup d’insuffisances, il y a urgence d’une vision stratégique pour dépasser la situation actuelle en ce monde impitoyable en perpétuel mouvement, un discours de vérité s’imposant loin de la langue de bois . Le constat est que l’Algérie est toujours en  2016  en  en transition, une véritable économie de marché concurrentielle productive, ni une économie étatisée  expliquant les difficultés de la régulation tant politique, sociale qu’économique. Durant cette période de transition difficile d’une économie étatisée à une économie de marché concurrentielle et l’Etat de droit est que les réformes sont timidement entamées malgré des discours que contredisent journellement les pratiques sociales, toujours  freinés lors que le cours des hydrocarbures augmente. Les banques, lieu de distribution de la rente, continuent de fonctionner comme des guichets administratifs, et du fait des enjeux des réformes souvent différées s’attaquant plus aux aspects techniques qu’organisationnels, alors qu’elles sont le moteur des réformes ;  la privatisation et le partenariat comme moyens d’investissement et de valeur ajoutée piétinent faute de cohérence et de transparence ; la facture alimentaire est élevé malgré le fameux programme agricole (PNDA) dont il conviendra de faire le bilan du fait de plusieurs de milliards de dollars de dépenses et la bureaucratie et la corruption continuent de sévir. Comme conséquence de l’incohérence et du manque de visibilité de la politique socio-économique, pratique de plusieurs décennies et non seulement de la période actuelle, la monnaie étant un rapport social traduisant la confiance entre l’Etat et le citoyen, nous assistons la chute vertigineuse du dinar tant sur le marché officiel que  sur le marché parallèle avec le  retour à l’inflation que l’on comprime par des subventions généralisées injustes via la rente,  alors que le ciblage s’impose, au refuge dans les activités spéculatives, au découragement du savoir et des entreprenants , à l’extension de la sphère informelle, à des tensions à travers toutes les wilayas  ce qui traduit les difficultés du système économique à générer une croissance hors hydrocarbures, seule condition pour faire face à ce malaise social. Un  large front social s’impose pour accélérer les  réformes structurelles. L'Algérie a besoin pour éviter la léthargie et la stérilité que tous ses enfants dans leur diversité, par la tolérance des idées d'autrui, se regroupent au sein d'un même objectif à savoir le développement économique et social tenant compte de la dure réalité mondiale où toute Nation qui n'avance pas recule forcément. Évitons le monologue et élargissons le débat à l’ensemble des  segments de la société. Car, du fait que la crise multidimensionnelle que traverse la société algérienne est systémique, cela dépasse le cadre strictement économique, renvoyant à des aspects politiques impliquant une gouvernance renouvelée et donc la refondation de l’Etat si l’on veut éviter à terme une implosion sociale aux conséquences désastreuses pour le pays. L’Algérie selon les observateurs internationaux , ayant été invité le 02 novembre 2016 à Alger à un large en tant qu’expert indépendant  avec la  délégation du Parlement européen (PE) à Alger présidé par M. Antonio Panzeri, Président de la Délégation pour les Relations avec les Pays du Maghreb, a toutes les potentialités, sous réserves de profondes réformes ,  pour asseoir une économie  diversifiée garante de la stabilité de la région de la région méditerranéenne et africaine

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NB- Le professeur Abderrahmane Mebtoul a dirigé avec une équipe pluridisciplinaire complexe composée d’économistes, de sociologues et de démographes entre 2007/2008 un important audit pour les pouvoirs publics(présidence de la république)  sur le thème – problématique de l’emploi et des salaires (huit volumes 980 pages).



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