Un député tunisien a présenté lundi une proposition de loi visant à faciliter l'égalité entre hommes et femmes en matière d'héritage, tout en insistant sur le caractère "facultatif" de sa proposition après une polémique suscitée par ce sujet sensible.
La Tunisie est considérée comme pionnière dans le monde arabe depuis l'adoption en 1956 du Code du statut personnel (CSP), qui a accordé aux femmes plusieurs droits et aboli la polygamie et la répudiation. Toutefois, les femmes héritent généralement de la moitié de ce qui revient aux hommes, comme le prévoit le Coran.
A l'initiative du député indépendant Mehdi Ben Gharbia, la proposition de loi signée par 27 élus -dont certains se sont depuis retirés selon des médias locaux- a été déposée le 4 mai au Parlement. "Cette loi n'est pas une loi pour l'égalité", a précisé d'emblée M. Ben Gharbia lors d'une conférence de presse. "Son objectif est de permettre aux citoyens de choisir".
Si la loi était adoptée, les héritiers auraient ainsi le droit de s'entendre pour un partage des biens aux termes de la loi actuelle, à savoir deux parts pour l'homme, une part pour la femme. Mais en cas de litige -une soeur réclamant d'hériter de la même manière que son frère par exemple-, l'Etat se devrait de trancher en faveur de l'égalité, a expliqué M. Ben Gharbia.
La question de l'égalité entre hommes et femmes en matière d'héritage reste une question très sensible en Tunisie. Avant même que le contenu de la proposition de M. Ben Gharbia soit connu, le mufti de la République, la plus haute autorité religieuse musulmane du pays, s'y est opposé."C'est un sujet qu'il ne convient pas d'aborder, ni maintenant ni plus tard, parce que le Coran est clair là-dessus (...). C'est la loi de Dieu, on ne peut pas la changer. C'est comme 1+1 égale 2, on ne peut pas dire 3 ou 6", a réagi Othmane Battikh vendredi.
Tout en rappelant qu'il avait fait de la prison sous la dictature déchue parce qu'il "voulait pratiquer (sa) religion", M. Ben Gharbia a souligné qu'il n'entendait pas se placer sur le plan religieux mais appliquer la nouvelle Constitution tunisienne de 2014, qui stipule que "citoyens et citoyennes sont égaux en droits et devoirs"."Nous avons une Constitution, ce ne sont pas des paroles en l'air, il faut la mettre en application. Cette schizophrénie, jusqu'à quand va-t-elle se poursuivre?" a-t-il lancé.(Afp)