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Système de retraite : éviter l’implosion des caisses en imposant des réformes

17-06-2016 12:37  Pr Abderrahmane Mebtoul

Dans le système en vigueur, toute personne ayant cumulé trente-deux années d’activité peut, s’il en fait la demande, partir à la retraite sans attendre l’âge de départ légal de 60 ans. En attendant qu’une économie productive se mette en place, dans le prolongement de mes directions d’audit(1) voici mes dix recommandations pour le gouvernement afin d ‘apaiser les tensions, permettre une meilleure efficacité économique et reposant sur plus de justice sociale qui ne saurait signifier égalitarisme, supposant une mutation de l’Etat providence reposant sur la rente, dépassé, à moins de vivre le drame actuel vénézuélien, en un Etat régulateur stratégique.

1.- Si l’Algérie veut éviter le retour au FMI avec des ajustements sociaux douloureux, une dévaluation importante de sa monnaie, la seule solution pérenne implique un nouveau modèle social collant aux réalités économiques et donc une révision profonde de l’actuelle politique socio-économique loin des schémas périmés du passé, passant par de profondes réformes structurelles, loin des aléas de conjoncture, conciliant efficacité économique et équité, par une solidarité sans faille.

2.-Le gouvernement doit méditer la récente faillite de l’économie vénézuélienne, du tout social avec une inflation de 180% en 2016 (planche à billets) , pays beaucoup plus riche que l’Algérie, 300 milliards de barils de pétrole, contre 10 pour l’Algérie, des réserves équivalentes en gaz naturel et de surcroit des potentialités agricoles énormes alors que l’Algérie est un pays semi aride.

3.-Avec la chute drastique du cours des hydrocarbures, menaçant la pérennité des caisses de retraite, étant un sujet très sensible, engageant toute la société, d’où l’importance d’une totale transparence dans les décisions et d’un dialogue social serein, outil de la bonne gouvernance, associant l’ensemble des forces sociales évitant le monologue et impliquant une communication correspondant aux nouvelles réalités, loin des discours démagogiques donc une moralité de ceux qui dirigent la Cité, pour un sacrifice partagé.

4.- S’impose une vision stratégique, une nouvelle politique salariale avec un écart substantiel entre la sphère économique, les segments contribuant indirectement à la création de valeur (critères du PNUD- santé-éducation), les emplois strictement administratifs et une harmonisation différenciée incluant toutes les catégories socioprofessionnelles y compris ceux du Ministère. Elle doit tenir compte tant des mutations mondiales, quatrième révolution industrielle avec de nouveaux métiers, que des mutations sociologiques et culturelles internes, le marché du travail devant se fonder sur plus de flexibilité, d’où l’importance d’une formation permanente de qualité et l’équité, si l’Algérie veut éviter sa marginalisation.

5.-Ne devant pas être utopique, la valeur de la monnaie, le dinar, le taux d’emploi étant fonction directement et indirectement à plus de 70% via la dépense publique, de la rente des hydrocarbures, qui représente avec les dérivées plus de 97% des exportations en devises et est à l’origine de l’essentiel de nos réserves de change, tenant compte de la structure et l’évolution démographique, l’alimentation des caisses de retraite en étant dépendante, 5% des recettes d’hydrocarbures, propriété de toute la Nation, doivent alimenter les caisses de retraite annuellement.

6.-Toutes les personnes ayant 32 années de travail plein peuvent aspirer à la retraite, sauf s’ils sont volontaires, et cas exceptionnel pour des personnes malades ou ayant subi un accident de travail. Tout travail au delà doit bénéficier d’un système de pondération.

7.-Pour les métiers pénibles, et les femmes, il y a lieu de prévoir des clauses de spécificité, variant entre 20/32 ans.

8.-Pour les métiers non pénibles, comme les professeurs d’université, médecins, fonction du déficit dans le secteur, ces derniers peuvent, s’ils le désirent, partir en retraite entre 65/70 ans, après une évaluation scientifique des différentes publications après le grade de professeur.

9.-Pour les cadres de l’Etat, un décret de 20 ans doit être exigé, y compris députés et sénateurs pour plus de justice sociale, un sous directeur de ministère ayant 10 ans de décret bénéfice d’une retraite à 100% alors qu’un professeur d’Université de plus de 32 ans, 80%.

10. -Pour bénéficier d’une retraite de Premier ministre et de ministre il faut avoir au moins 5 ans, en deçà le calcul se faisant proportionnellement selon toutes les années de service.

D’une manière générale, toutes les institutions supposant éclairer le gouvernement sur les enjeux géostratégiques et proposer des solutions concrètes, et elles sont nombreuses sans coordination entre elles, de surcroit budgétivore, n’ont pas joué leur rôle, devant impérativement revoir leur fonctionnement par un regroupement des meilleures compétences nationales loin de toute cooptation. Je rappelle qu’en 2008 dans un audit réalisé sous ma direction, avec une équipe pluridisciplinaire composée d’Algériens, audit réalisé gratuitement, sur l’emploi et les salaires, mais avons-nous été écoutés par les tenants de la rente (1), nous avons proposé des stratégies d’adaptation à ce nouveau monde en plein bouleversement géostratégique. L’Algérie sous réserve d’une gouvernance renouvelée, d’un discours de vérité, et en donnant le primat à l’économie de la connaissance peut aspirer à devenir une nation émergente. Le cas contraire, ce qu’aucun algérien ne souhaite, malgré ses richesses naturelles qui ne font pas le développement ( étant un moyen), elle pourrait rejoigndre horizon 2025/2030, les pays les plus pauvres de l’Afrique subsaharienne avec des incidences de déstabilisation au niveau de toute la région.

(1)- Le professeur Abderrahmane MEBTOUL a dirigé avec une équipe pluridisciplinaire le dossier emploi/salaires pour le compte de la présidence de la République ( 8 volumes 2007/2008).



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