Ahmed Ouyahia est plébiscité au premier jour des travaux du congrès extraordinaire du parti , jeudi, comme secrétaire général du RND avec 1.513 voix sur les 1.601 exprimées. Son challenger, Belkacem Mellah n’en a récolté que 21. Il aura, pour le coup, accepté de servir de lièvre pour donner une apparence de pluralité au vote. Ahmed Ouyahia ne manquerait certainement pas de lui renvoyer l’ascenseur, à l’occasion des prochaines législatives de 2017, en le plaçant en position éligible sur une des listes du parti. Peut être Oum El Bouaghi dont il a déjà été député.
Le retour d’Ahmed Ouyahia à la tête du RND, non sans un certain panache d’ailleurs, n’est pas du tout une surprise pour les observateurs. Il sort grandi de ce congrès extraordinaire, qui consacre en creux l’échec de ceux qui ont mené une fronde contre lui, en exigeant notamment le repport du congrès, tout en l’accusant d’avoir violé les statuts du parti.
Ce qui constitue en revanche la surprise du chef c’est ce message tout en louanges du président Bouteflika. C’est une première dans les usages de la République. Même Amar Saâdani qui a pourtant mouillé la chemise pour le chef de l’Etat n’a pas eu droit à cet honneur. C’est juste Ahmed Gaid Salah qui lui avait exprimé à l’époque ses félicitations, qui ont donné d’ailleurs lieu à une tempête médiatique.
Le message du président n’est pas qu’un geste de courtoisie protocolaire. Les mots choisis ont l’air d’avoir été pesés au trébuchet. On remarquera d’emblée que le chef de l’Etat saluera l’élection d’Ouyahia intervenue, au terme d’une « opération démocratique ». Dans la foulée, il rendra aussi un hommage au RND en saluant ses « positions nationales marquées du sceau de l’intégrité et de la sagesse, dans le seul but de placer les intérêts suprêmes du pays au dessus de toute considération, à la faveur d’un programme politique et social rénové et d’une ligne nationale droite ».
Ce n’est pas, nous semble t-il, dans les habitudes du président de gratifier de tels lauriers le RND, un parti vis-à-vis duquel il a toujours eu une « distance affective », comparativement au FLN dont il est un légitime. Mais le clou du message présidentiel se trouve dans le troisième paragraphe dans lequel le président Bouteflika crédite le patron du RND d’un destin national. Sinon comment expliquer qu’il lui écrive « que votre éclatante victoire pourrait contribuer à relever les grands défis qui se posent à notre pays ».
Voilà donc Ouyahia désormais investi de la mission de relever les nouveaux défis qui se posent à notre pays » Comment ? Dans quel costume ? Supposément dans celui de premier ministre pour succéder au vaillant Sellal par trop usé par le métier. En lisant la suite du message du président Bouteflika, on a même cette impression qu’il fixe déjà une feuille de route à Ahmed Ouyahia en lui définissant la nature des défis à relever, en l’occurrence, le « développement national global », la « garantie des libertés fondamentales, de promotion du rôle de la femme », la « prise en charge des préoccupations des jeunes, ainsi que toute entreprise à même de consacrer la paix et la stabilité dans notre pays ».
En somme, le message du président Ouyhaia dresse un portrait robot du futur premier ministre. C’est dans l’ordre des choses, puisque le changement du gouvernement, ce serpent de mer, on en parle à nouveau.
L'autre message à décrypter, sous couvert d'une salve de remerciements et de reconnaissance, constitue le prélude à un débarquement de Ouyahia de son poste de directeur de cabinet de la présidence de la république et de le confiner au RND où il aura en bon et fidèle soldat à soutenir au même titre que le FLN, le programme du président et celui de son successeur le moment venu.
Le président rechercherait également, après les attaques au vitriol de Amar Saâdani contre Ouyahia, à créer un autre mode de rééquilibrage des pouvoirs et des responsabilités entre les deux partis (FLN et RND) en les mettant sur le même pied d'égalité.