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L'Occident place ses espoirs dans la victoire d’al-Assad

19-12-2013 20:36  Contribution

L'opinion selon laquelle la victoire du président syrien Bachar al-Assad serait la meilleure issue prend le dessus à Washington. Cela promet au moins d’espérer un futur meilleur, tandis que sa défaite signifierait qu'il n'y a plus d’avenir.

La thèse du « moindre mal » a été énoncée par l'ex-directeur de la CIA Michael Hayden. Selon lui, les événements en Syrie peuvent évoluer d'après trois scénarios. « Un des scénarios est la victoire d'al-Assad. Pour le moment, si épouvantable que cela puisse paraître, c'est la meilleure solution ». Michael Hayden estime que les autres scénarios sont l'escalade des affrontements entre les groupes radicaux chiites et sunnites et (ce qui est encore plus probable) l’éclatement du pays. « Ce qui déclenchera le processus de désintégration des Etats artificiels apparus au lendemain de la Première Guerre mondiale », affirme l'ex-directeur de la CIA.

La défaite prochaine d’al-Assad a été pronostiquée dès le début du conflit. De l'avis général, la ruine totale attendait l'armée et les services secrets. Il y a eu, en effet, des cas de défection, mais ce phénomène n'a pas revêtu de dimension massive. Le temps passait et les observateurs ont dû constater que Damas s'appuyait non seulement sur la force armée, mais aussi sur une certaine partie de la population. Bref, al-Assad était plus fort qu'on ne l'avait pensé.

La guerre civile en Syrie a ceci de particulier que même la population neutre se voit obligée, pour survivre, de rallier un des groupes opposés. A présent al-Assad est soutenu non seulement pas ses coreligionnaires, mais aussi par les Syriens qui se sont convaincus des avantages de la stabilité sur le chaos révolutionnaire.

Tabler sur al-Assad n'est pas une question de convictions politiques, mais de pragmatisme. Il s'agit de ce pragmatisme dont les Américains ont toutes les raisons d'êtres fiers et qui, dans le dossier syrien, a été provisoirement éclipsé par leur concentration excessive sur le doctrinarisme. Heureusement le pragmatisme en tant que trait national a repris le dessus dans les hautes sphères américaines, fait remarquer l'expert militaire du Liban Amin Hoteit :

« Le but des Américains était le renversement du régime d'al-Assad. Ils étaient même prêts à une ingérence militaire directe après près de trois ans d'activités subversives en Syrie. Cependant l'intervention n'a pas eu lieu car ils comprenaient que l'échec était imminent et qu’ils n’auraient pas atteint leurs objectifs. Leur pragmatisme ne leur permettait pas d'utiliser le mot « échec ». D'où un changement de rhétorique : les Américains se sont mis à privilégier l'aspect international soulignant que la destitution d'al-Assad ne répondait plus aux intérêts de la Maison Blanche. Comme quoi, Assad est préférable à la dégradation de la situation avec ses conséquences imprévisibles».

La révolution en Syrie a commencé comme un mouvement laïque en faveur de la démocratie pour dégénérer en carnage religieux. Les fondamentalistes des groupes islamistes ont remplacé les citadins pro-occidentaux. La lutte pour la progression de la Syrie vers un avenir libéral radieux s’est transformée en combat pour le retour vers un passé archaïque sombre.

C'est ce qui effrayait l'Occident. La faillite de Bachar al-Assad laissait craindre la désintégration du pays, « libanisation », voire sa « somalisation ». C'est cette perspective qui oblige les Etats-Unis à revoir leur position sur la Syrie, estime le rédacteur en chef de la revue « La Russie dans la politique globale » Fiodor Loukianov :

« En effet, tous les spécialistes américains raisonnables disent que tout scénario de victoire de l'opposition est pire que le reste. Avec al-Assad, quel qu'il soit, la Syrie était assez stable et, peut-être, elle le sera encore. Si on le laisse gagner, le problème sera ajourné, du moins provisoirement. Il est impossible de le déclarer au niveau politique. Comment expliquer alors les efforts déployés pendant ces dernières années. Ensuite, les alliés des Etats-Unis sont trop déçus par le refus d'Obama d’intervenir militairement. Pourtant depuis septembre le refus des Etats-Unis de s'empêtrer dans le bourbier d’un quelconque conflit au Proche-Orient croît de manière géométrique. La déclaration de Hayden montre qu'il ne s'agit plus d'un point de vue marginal ».

Ce serait une erreur de penser que l'Occident déborde d'enthousiasme à propos d'al-Assad. Tout de même Zbigniew Brzezinski, qui était tout récemment encore un des principaux idéologues de la politique étrangère des Etats-Unis, a déclaré que la victoire d'al-Assad n'était pas aussi effrayante que celle de ses adversaires, beaucoup plus hostiles envers les Etats-Unis.

En l'occurrence, le problème de Genève 2 mérite une attention particulière. L'opinion est répandue selon laquelle les Américains voudraient renvoyer sa convocation à la date la plus éloignée possible, voire y renoncer complètement. Pourtant sa convocation va dans le sens des intérêts des Américains dans un contexte où des groupes terroristes jouissent d'une plus grande influence en Syrie et où l'imprévisibilité ne cesse de croître.

Il est peu probable que la victoire hypothétique de Bachar al-Assad rétablisse aussitôt la paix. La Syrie est aujourd'hui un pays ruiné avec son infrastructure détruite, affecté par la famine et d'autres problèmes humanitaires. Tout cela constituera un lourd fardeau pour les Syriens et les adversaires d'al-Assad trouveront de nouveaux arguments pour tenter de déséquilibrer la situation. Mais sa victoire fait naître l'espoir d’une issue favorable. (La Voix de la Russie)



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