Pour le Ministre des Finances, l’Etat algérien n’a pas renoncé dans le projet de loi de finances 2017 à la politique des subventions mais qu’il réfléchit, face à la chute du cours des hydrocarbures à ce qu’elles s’adressent à l’avenir aux plus démunis et que les transferts sociaux entre produits alimentaires, soutient à la santé et au logement social représenteront 23,5% du budget. C'est ce que j'ai proposé depuis de longues années (voir www.google.com 2009), certaines organisations patronales dont le FCE et partis politiques reprenant en 2016 mes idées et je m’en félicite. C’est que grâce à l’aisance financière générée par les hydrocarbures, le gouvernement, au nom de la paix sociale, a généralisé les subventions, objet de cette présente contribution, brève synthèse d ‘un long rapport que j’ai remis au gouvernement en 2014. Que de pertes de temps et d’argent, certains responsables vivant encore de l’illusion de la rente éternelle alors que s‘impose l’urgence de réformes structurelles afin d’éviter le retour au FMI horizon 2019/2020, liant efficacité économique et la nécessaire cohésion sociale.
1.- Situation des subventions
Le contrôle des prix à l’aval uniquement sur les détaillants s’est avéré un échec, les circuits internes étant dominés par les monopoleurs de la sphère informelle, produit de la bureaucratie contrôlant 40% de la masse monétaire en circulation et 65% des segments des produits de première nécessité. Le prix du pain étant subventionné depuis 1996, sans subventions, le prix de la baguette actuellement à 8,50-10 dinars – officiel – dépasserait 25 DA. Le soutien des prix des blés et du lait ont des incidences financière, les subventions octroyées en référence au prix international, un différentiel qui reste mobile en fonction des fluctuations du prix d’achat de la matière première sur les marchés mondiaux, étant supportées par le Trésor public. Pour les carburants, l'Algérie, malgré les légères augmentations contenues dans la loi de finances 2016, est classée troisième pays où le prix du carburant est le moins cher au monde, selon les organismes internationaux. Le rapport du FMI de 2012 montre clairement que l’écrasante majorité de la subvention indirecte aux carburants profite aux personnes les plus aisées de la population. Sur les 1756,5 milliards de dinars de subventions consacrées aux carburants, ce sont plus de 1050 milliards qui sont consommés par les 2 tranches supérieures de revenus de la population. Mais conserver cette politique coûte de plus en plus cher. En effet, ces dernières années, l’Algérie est devenue importatrice de produits raffinés. La différence du prix à la pompe avec les pays voisins fait que de grandes quantités de carburants traversent quotidiennement les frontières vers le Maroc et la Tunisie, sans compter les pays riverains du grand Sud.
Pour l’électricité/gaz, selon un rapport du Ministère de l’Energie, le niveau du prix du gaz concédé aux centrales est de l'ordre de 10 % de celui qui correspond aux transactions internationales du gaz, une différence qui grève considérablement le budget de Sonelgaz , les coûts de revient restant élevés par rapport aux tarifs appliqués. Sonelgaz ayant accusé 99 milliards de dinars de pertes selon son rapport de 2015. Les subventions de l’électricité s’ils sont maintenus ont de quoi décourager tout investisseur étranger dans ce domaine rendant caduque la loi sur l’’élecrricité et le gaz par canalisation. Le problème de la tarification de l’eau se pose à peu près dans les mêmes termes que les carburants. Son prix de cession demeure inchangé malgré des couts croissants, problème aggravé par les déperditions du réseau de distribution (45 à 50 % de pertes, en moyenne nationale). Pour le système de santé, les subventions supportées par l’Etat sont importantes.. Le patient paye 100 DA pour une hospitalisation et 50 DA pour une visite médicale dans un CHU, un dispensaire ou un centre sanitaire. Dans une clinique privée le coût d’une hospitalisation dans le secteur privé varie entre 15 000 et 20 000 DA/jour ; celui d’un accouchement oscille entre 35 000 et 40 000 DA et à partir de 70 000 DA pour une césarienne et le montant est largement supérieur pour des interventions pointues fluctuant entre 200.000 et plus de 1.000.000 de dinars sinon plus y compris l’hébergement . Pour le transport, il n’y pas uniformité devant distinguer le transport par rail subventionné des autres moyens de transport qui connait un déficit structurel. Pour Air Algérie, les tarifs sont en hausse par rapport aux normes internationales donnant pour les autres compagnies aériennes desservant l’Algérie une rente, une rente, leurs tarifs s’alignant sur ceux d’Air Algérie, pénalisant les consommateurs. Pour le transport routier de voyageurs, on assiste à des conflits permanents du fait du bas tarif et de la confusion de l’interprétation de l’ordonnance 95/06 et du décret 96/39 où l’un parle d’une limitation à 0,25 centimes/km pour un service de ramassage et l’autre explicite que tous les tarifs sont libres et soumis à la concurrence sauf ceux spécifiques et stratégiques , ce qui revient à dire que les subventions sont supportés indirectement, en partie, par les transporteurs privés.
Les subventions s’appliquent également au logement social où le prix du mètre carré dans les grandes agglomérations varie de 40 000 à 300 000 DA, voire 1.000.000 dinars dans les quartiers résidentiels non supportés par les bénéficiaires, ce qui qu’occasionne un transfert de rente. Quant au logement promotionnel aidé d’un prix réel de 6 millions de dinars, l’Etat l’a cédé à environ 3 millions de dinars. Pour l’aide à l’emploi où .l’entreprise qui recrute, bénéficie d’importantes facilités financières et fiscales, d’importants abattements sur la cotisation de sécurité sociale à leur charge, soit l’équivalent de 25% de l’assiette globale de cotisation.. Pour financer la retraite, l’employeur cotise à 10% et le salarié 6,75%, soit un total de 17,25%, 82,75%, étant financés par l’Etat. Les assurances sociales, notamment celles relatives à la maladie, à la maternité, à l’invalidité et au décès, sont couverts par l’Etat pour un total de 86%, sachant que les 14% restant sont assumés par les cotisations versées par l’employeur (12,5%) et le salarié (1,5%). Enfin la charge financière du transport des étudiants, de la restauration et de l'hébergement , sans distinction, ce qui se répercute sur la gestion des œuvres universitaires comme le prix de la restauration, toujours fixé depuis les années 1970 à 1,20 DA le repas. Qu’en sera-t-il avec plus de 2 millions d’étudiants horizon 2020 où uniquement pour le repas, le prix réel dépasse 1000 dinars. Cela concerne également les œuvres sociales des CEM et des lycées.
2.-L'État algérien et la généralisation des subventions
Sonatrach fait vivre la majorité de la société algérienne 98% d’exportation, exilique le niveau des réserves de change qui tiennent la cotation du dinar , l’importation de 70-75% des besoins des entreprises publiques-privées ainsi que les besoins des ménages et l’importance de la dépense publique donc par ricochet le taux de croissances et le taux d’emploi. L’Etat algérien a dépensé sans compter, a subventionné un grand nombre de produits de première nécessité, comme les céréales, l'eau et le lait, l'électricité et le carburant. En Algérie de celui qui gagne le SNMG au chef d'entreprise national ou étranger, bénéficient des prix subventionnés, n’existant pas de système ciblé de subventions. Dans son rapport en date du 18 avril 2012, la Banque mondiale fait remarquer qu’en moyenne dans le monde, 20% des plus riches bénéficient six fois plus que 20% des plus pauvres des subventions recommandant que les programmes d'aide sociale doivent être ciblés de manière à aider les ménages pauvres et vulnérables à y faire face. Pour l’Algérie, la même institution note que pour 2012 que les montants des subventions sous forme de comptes spéciaux du Trésor, recensant sous différentes appellations 14 fonds, allouées au soutien de services productifs, à l’accès à l’habitat et aux activités économiques sont successivement de 40,83, 520,11 et 581,78 milliards de dinars, soit un total d’environ 1.143 milliards de dinars (équivalent à 16 milliards de dollars au cours de l’époque ), représentant 14% du total des dépenses de l’État en dehors des dépenses de fonctionnement. Pour la BM, 277 milliards de dinars ont été réservés aux produits de large consommation (blé, lait en poudre, etc.), soit l’équivalent du quart des subventions accordées au budget d’équipement. A cela s’ajoutent les assainissements répétés aux entreprises publiques qui ont couté au trésor public plus de 60 milliards de dollars entre 1971 et 2015, les exonérations fiscales et de TVA accordées par les différents organismes d’investissement (ANDI ANSEJ) y compris pour les entreprises étrangères, dont il conviendrait de quantifier les résultats par rapport à ces avantages à coup de dizaines de milliards de dinars.
Le pouvoir algérien ne voulant pas de remous sociaux, les subventions joue comme tampon social avec ce retour à l’inflation Ainsi, les différentes lois de finances de l’indépendance à 2015, avec un léger redressement lors de l’ajustement structurel de 1994, ont proposé des mesures qui ont pour finalité de pérenniser la politique de l'Etat en matière de subvention des prix des produits de large consommation., encore qu’il n’est pas juste que tout le monde puisse bénéficier de certaines subventions, quelle que soit sa situation financière. . Ainsi, se pose le problème de l’efficacité de toutes ces subventions sur le producteur local et sur le consommateur final, avec le processus inflationniste, bien que compressé artificiellement par les subventions, du programme de relance économique basé sur la dépense publique donnant des taux artificiels de taux de croissance, de taux de chômage. Outre cette disparité dans l’octroi du soutien de l’Etat, il est signalé l’opacité dans la gestion de ces programmes Les surcouts avec parfois des abandons de projets, sont exorbitants, estimés entre 20 à 30% pour certains projets, étant des subventions indirectes supportées par le trésor. Comme est posé l’efficacité du programme national du développement agricole (PNDA) qui a nécessité des dizaines de milliards de dollars, (aucun bilan à ce jour) et de l'effacement de la dette des agriculteurs sur la productivité agricole
3.--Pour des subventions ciblées
Les rapports internationaux montrent l’urgence de subventions ciblées du fait que les produits subventionnés sont consommés majoritairement par la population la plus aisée dont les industriels et les fabricants de boissons gazeuses, En divisant la population en 5 catégories (quintiles) selon leur revenu, le FMI note que le quintile supérieur (Q5), c’est-à-dire au plus haut revenu, consacre près 26% de ses revenus à la consommation de produits céréaliers. Le quintile inférieur (Q1) utilise moins de 15% de ces revenus pour les céréales et dérivés. Le constat est le même pour le lait et produits laitiers avec 30% pour le Q5, contre environ 12% pour le Q1. Les proportions sont quasi-identiques pour les huiles et corps gras ainsi que pour le sucre et ses dérivés. Ainsi selon ce rapport, les plus hauts revenus consomment beaucoup plus de produits subventionnés que les catégories défavorisées de la population et pour les carburants, le contraste est encore plus frappant.
Par ailleurs, les subventions généralisées faussent l’allocation rationnelle des ressources rares et ne permettent pas d’avoir une transparence des comptes, fausse les normes de gestion élémentaires et les prévisions tant au niveau micro que macroéconomique, aboutissant au niveau des agrégats globaux (PIB, revenu national) à une cacophonie additionnant des prix du marché et des prix administrés. Ils découragent, non ciblées, la production locale avec un gaspillage croissant des ressources financières du pays. Comme se pose cette question stratégique : qu’en sera-t-il avec le dégrèvement tarifaire avec l’Europe horizon 2020 et son éventuelle adhésion à l’OMC où les produits énergétiques sont également concernés notamment par la suppression de la dualité du prix du gaz? Se pose cette question stratégique pour l’Algérie : peut-elle continuer à fonctionner sur la base de 70 dollars pour le budget de fonctionnement et 40-45 dollars pour le budget d’équipement comme en 2014/ ou encore avec un cours du baril approchant 90 dollars en 2016 en misant sur les infrastructures et une vision dépassé de l’ère matérielle des années 1970 alors que nous sommes à l’aube d’ne nouvelle révolution économique tenant compte de la protection de l’environnement.
L’Etat pourrait ne pas avoir les moyens de continuer à subventionner certains produits alimentaires en cas où le baril descendrait en dessous de 70 dollars.200 Je préconise depuis 2009 au gouvernement l’instauration d’une chambre nationale de compensation indépendante, relevant du premier ministre permettant des subventions ciblées, par un système de péréquation inter socioprofessionnelle et inter- régional. Avec la baisse du cours des hydrocarbures de longue durée, le gouvernement ne peut plus dépenser sans compter pour une paix sociale fictive grâce aux hydrocarbures qui s’épuiseront dans 15 à 20 ans au moment où la population algérienne sera d’environ 50 millions d’habitants. Il s’agit impérativement de dépasser le statu quo actuel suicidaire et réorienter toute la politique économique pour l’émergence d’une économie hors hydrocarbures et ce pour le bien être de l’Algérie et des générations futures, mettant fin au cancer de l’économie de la rente qui se diffuse dans la société par des subventions généralisées et des versements de traitements sans contreparties productives ? Face à la concentration excessive du revenu national au profit d‘une minorité rentière, renforçant le sentiment d’une profonde injustice sociale, l’austérité n’étant pas partagée, la majorité des Algériens veulent tous et immédiatement leur part de rente, reflet du divorce État / citoyens, quitte à conduire l’Algérie au suicide collectif.