Campagne électorale oblige, les différents candidats, gauche et droite, à la présidentielle française du mois de mai prochain, rivalisent de déclarations «pleurnicheantes» à l’égard des harkis. Certains ont été jusqu’à écraser une larme de crocodile sur le sort de ces supplétifs algériens de l’armée coloniale que la France a oublié. A tout seigneur, tout honneur, le président François Hollande a reconnu aujourd’hui dimanche «les responsabilités des gouvernements français dans l’abandon des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie et les conditions d’accueil inhumaines de ceux transférés en France».
Dans une allocution qu’il a prononcée dans la cour de l’Hôtel national des Invalides, dans le cadre de la journée nationale d’hommage aux harkis, Hollande a pris faits et cause avec ces supplétifs dont il a souligné la «vérité implacable» et «cruelle » s’agissant de leur sort. Le candidat à sa propre succession a donc fait du Sarkozy en se lamentant sur la condition de ces «combattants qui furent privés de la protection de la France au lendemain de la guerre d’Algérie et dont l’abandon ne fut jamais pleinement reconnu par la République ».
Hollande honore ainsi une promesse de campagne de 2012, quand il s’était engagé à reconnaître la responsabilité de la France «dans l’abandon des harkis». Du coup, il souhaite un retour de balançoire de la part des harkis encore vivants ou de leurs descendants (500.000 selon des sources françaises) pour l’aider à obtenir une rallonge de son mandat présidentiel.
Hollande pointe aux Invalides
Implicitement François Hollande, écorche l’Algérie en suggérant qu’elle a massacré les harkis. Mais vue d’Algérie ces individus sont coupables de traitrise à la Glorieuse Révolution en ayant retourné leurs fusils contre leurs compatriotes. Jusque là Hollande s’était gardé d’afficher clairement son soutien franc aux harkis. En 2012, il avait fait lire un message par Kader Arif, alors ministre délégué aux anciens combattants, lors d’une cérémonie d’hommage aux harkis. En tenant aujourd’hui à pointer aux Invalides, le patron de l’Elysée cherche un soutien pour sa réélection alors même que sa côte de popularité est au plus bas niveau.
Mais il n’est pas le seul dans cette entreprise de charme aux harkis. Nicolas Sarkozy y est allé lui aussi de ses promesses. «Le drame des harkis est celui de toute la France (…) Une tâche de sang indélébile reste sur notre drapeau », a-t-il déclaré samedi soir lors d’un meeting à Perpignan.
Sarkozy veut ouvrir les archives de la guerre d’Algérie
Pour l’ex président, «A travers les harkis, c’est tout notre roman national qui s’écrit : celui des femmes et des hommes du monde entier qui ont adopté la France, ses valeurs, sa nation. Parmi eux, une place privilégiée est faite aux Français musulmans morts pour notre liberté et notre drapeau». Sarkozy s’est même engagé à rouvrir les archives de la guerre d’Algérie s’il est élu.
Même tonalité chez son ancien Premier ministre et candidat à la primaire de droite, François Fillon. Ce dernier a écrit sur sa page Facebook qu’il fallait «réparer les injustices vis-à-vis des harkis. Fillon promet lui aussi, s’il est élu, «des gestes symboliques nécessaires pour remettre les pendules à l’heure et l’histoire de notre pays où elle doit être ».
Même tonalité du côté de Bruno Le Maire, qui appelé l’Etat, dans une tribune sur le Huffington Post, à «assumer sa responsabilité» après «l’abandon indigne des harkis».
C’est dire qu’en France, tous les moyens semblent bons pour les candidats à la présidentielle dans leur quête éperdue de soutiens, quitte à froisser la sensibilité des algériens pour qui les harkis restent une catégorie d'individus qui a choisi de prêter main forte à l’ennemi.