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L'actrice marocaine Loubna Abidar, honnie dans son pays, se raconte dans un livre

14-05-2016 08:41  Agence

Agressée dans son pays après avoir tenu le rôle d'une prostituée dans le film "Much Loved", la comédienne marocaine Loubna Abidar, désormais réfugiée en France, raconte la vie d'une femme arabe dans un monde d'hommes dans un livre à paraître mercredi en France.

"Loubna Abidar est l'incarnation d'une résistance.

Le symbole de toutes les femmes que la tradition patriarcale, misogyne et machiste divise en deux catégories: les pures et les putes", affirme Marion Van Renterghem, grand reporter au quotidien Le Monde, qui co-signe "La dangereuse", publié aux éditions Stock.

Actrice connue au Maroc, Loubna Abidar est devenue une paria dans son propre pays après avoir osé incarner une prostituée dans le film "Much Loved" du franco-marocain Nabil Ayouch.

On y voit la comédienne nue jouer des scènes de sexe. Ce rôle lui a valu plusieurs prix: le prix Valois de la meilleure actrice au Festival du film francophone d'Angoulême (France) et le Bayard d'or au Festival de Namur (Belgique).

Elle a été en lice cette année pour le César (équivalent français de l'Oscar) de la meilleure actrice.

Mais le film, présenté au prestigieux Festival international de Cannes en 2015, a été interdit au Maroc où il est considéré comme "un outrage grave aux valeurs morales et à la femme marocaine, et une atteinte flagrante à l'image du royaume".

"La catastrophe a commencé quand je suis sortie du ventre de ma mère", écrit la comédienne âgée de 30 ans. Sa tare? Ne pas être née garçon.

L'occupation favorite de son père, raconte-t-elle, est de la frapper "deux ou trois fois par jour, tous les jours".

Le Maroc n'a pas voulu de moi

Violée par son père, elle se souvient que lorsqu'elle essaiera de le raconter à sa mère "bien plus tard", "elle ne voudra pas me croire".

Personne ne parle de ce que les hommes "peuvent faire à leur fille, à leur nièce", s'indigne Loubna Abidar.

"Personne n'en parle puisque les femmes sont supposées demeurer vierges jusqu'à l'instant de leur mariage.

La virginité, croyez-moi, c'est le plus gros mensonge du monde arabo-musulman".

Femme libre, elle raconte sa rencontre à 16 ans avec le DJ Claude Challe, de 40 ans son aîné, sa découverte de Paris, son mariage avec Bernardo, un entrepreneur brésilien avant ses débuts au cinéma. Un premier rôle dans un film comique puis arrive "Much Loved".

Dès le lendemain de sa projection à Cannes, la comédienne doit faire face à un torrent d'insultes sur les réseaux sociaux.

Son retour au Maroc est une catastrophe. La jeune femme doit se terrer chez elle, si elle sort elle doit enfiler une burqa pour ne pas être reconnue.

Le 6 novembre 2015 elle est agressée dans une rue de Casablanca.

On l'empêche d'aller à l'hôpital, des policiers refusent de recueillir sa plainte. Dès le lendemain, elle s'envole pour la France. "Le Maroc n'a pas voulu de moi.

Il ne veut pas de la femme que je suis et de ma liberté à l'affirmer", écrit Loubna Abidar qui rend hommage à la France pour son accueil.

Elle se rendra de nouveau à Marrakech "en catimini" pour voir sa famille en janvier 2016 mais désormais sa vie est en France. La faute en revient "aux barbus" qu'elle dénonce et interpelle avec force. "Vous avez inventé un nouvel islam qui est fait de n'importe quoi", dit-elle.

La jeune femme qui se revendique musulmane affirme: "Je crois à ce que dit le prophète Mahomet, pas à l'islam d'aujourd'hui qui opprime les femmes et la liberté de penser".(Afp)



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