Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a dû afficher sa mine des mauvais jours en écoutant cet après-midi le chef de la délégation du FMI (Fond monétaire international) Jean François Dauphin, discourir ex cathedra sur le financement non conventionnel. En effet, le chef du département Maghreb, Moyen Orient et Asie centrale, du FMI a pratiquement déconstruit la mesure phare préconisée par le Premier pour faire face au déficit budgétaire et financer l’économie nationale.
« Le financement monétaire est synonyme de source d’inflation, nous préconisons de ne pas l’utiliser», tranche d’emblée Jean François Dauphin, venu en Algérie à la tête d’une délégation d’experts pour scanner l’économie. Des propos qui vont sans doute froisser le gouvernement qui a fait de la planche à billets une recette miracle pour secouer une économie rentière au stade végétatif, en les mettant sous perfusion.
Ce n’est point une bonne ordonnance, certifie cet expert du FMI, allant ainsi à contre sens des belles assurances du Premier ministre selon lesquelles, il n’y avait aucun risque d’inflation. Pis encore, et contrairement au discours alarmiste du gouvernement qui évoquait même «la perte de la souveraineté économique», Jean François Dauphin, a estimé que le recours au financement extérieur c’est-à-dire à l’endettement est loin d’être une hérésie pour peu que cet argent serve à lancer de grands projets à même de booster la croissance et l’emploi. «Le financement extérieur doit être orienté vers des projets structurants capables de générer de la croissance», prône l’expert du FMI.
Risque d’inflation
Une façon de glisser que l’endettement extérieur ne devrait pas être utilisé pour payer les salaires ou financer des projets populistes ou de luxe qui n’ont aucun impact positif sur l’emploi et la croissance. Jean François Dauphin qui animait une conférence de presse à l’hôtel El Aurassi a tout de même concédé que le FMI partageait l’objectif du gouvernement algérien d’amorcer la diversification de l’économie. «On est tombé d’accord avec les autorités algérienne sur la nécessité de diversifier l’économie, et de passer les relais de croissance au secteur privé pour assurer un ajustement de l’économie de manière douce», a-t-il déclaré.
Dans la même veine, le chef de mission du FMI a mis l’accent sur la nécessité pour le gouvernement de procéder à «l’assainissement des finances publiques, entreprendre des réformes structurelles pour développer le potentiel de croissance et lever les contraintes à l’investissement privé».
De la même manière le conférencier affirme avoir recommandé «l’amélioration de l’environnement de l’entreprise, la transparence du gouvernement, la «débureaucratisation», à travers une administration électronique et enfin, le développement du marché des capitaux.
Autant dire tout un paquet de réformes que l’institution de Bretton woods, ne cesse de recommander depuis des années à l’Algérie.
Des mesures qui sonnent le déjà entendu, en effet, tant l’ordonnance n’a pas vraiment changé depuis que l’Algérie s’est sortie des fourches caudines du FMI précisément, à la faveur du programme d’ajustement structurel.
Plus de deux décennies plus tard, notre pays se retrouve quasiment dans la même situation de panne économique et de creusement inquiétant du déficit budgétaire fortement impacté par l’effondrement des cours du pétrole.