Algérie 1

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Face à la crise mondiale, urgence d’un renouveau de la gouvernance

02-10-2020 12:08  Pr Abderrahmane Mebtoul

Les discours démagogiques  de propagande ne portent plus  et au contraire jouent comme facteur de démobilisation.  A un mauvais diagnostic résulte forcément de mauvaises solutions. Aussi, s’impose un discours de vérité  et  un bilan serein de la situation actuelle et des solutions adéquates pour faire face à la crise qui secoue pas seulement l’Algérie mais le monde . L’Algérie n’échappe donc  pas à la règle avec les tensions géostratégiques au niveau de la région et la baisse drastique des réserves de change via la baise des recettes d’hydrocarbures procurant avec les dérivées 98% des entrées en devises. Le grand défi de l’Algérie 2020/82025 sont les réformes institutionnelles et micro-économiques dans le cadre d’une vision datée renvoyant à la refonte de l’Etat pour des missions adaptées tant dans le cadre des nouvelles relations internationales que d’une redéfinition des liens Etat-Marché.

.1.-Pour l’Algérie, toute action  opérationnelle doit au préalable  analyser l’ évolution  du cours  des hydrocarbures   avec les dérivées des hydrocarbures , influant sur le taux de croissance, le taux de chômage, et le niveau des réserves de change ( notre interview Monde.fr/AFP Paris 10/08/2020) . La baisse d‘un dollar en moyenne annuelle lui occasionne un manque à gagner entre 400/600 millions de dollars selon les fluctuations du cours où 33% les recettes de Sonatrach proviennent du gaz naturel. Le prix du gaz  au niveau mondial entre 2007/ et septembre 2020  a baissé de plus de  de 75% , beaucoup plus que le pétrole étant passé de 15/16 dollars pour le GLN  à 4/5 dollars  et de 9/10 dollars pour le gaz naturel -GN - ayant fluctué entre 2019/2020 pour la même entre 1,7 et 2,5 dollars  qui procure environ 33% de recettes de Sonatrach entre 2018/2019   qui a chuté de plus de 75% entre 2008/2020 ( le cours le 02 octobre 2020 sur le marché libre étant de 2,264 dollars le MBTU),couvrant à peine les couts de production. Au recettes brutes ,de Sonatrach  l’on devra  soustraire les couts et la part  des associés,   et  le manque à gagner de la réduction de la production décidée par l’OPEP pour l’Algérie d’environ 3 milliards de dollars en moyenne annuelle., rendant urgent un nouveau management stratégique de Sonatrach afin de réduire les couts.  Mais attention aux faux calculs car le cours réel du pétrole, doit être rattaché au pouvoir d’achat du dollar qui s’est déprécié depuis le début de l'année 2020  étant cotée à  1,070 dollar un euro et est coté le 02 octobre 2020  à 1,171 dollar un euro, une baisse de 10%, en raison des  incertitudes de l'économie américaine et surtout du gonflement du déficit budgétaire. . Ainsi, le 02 octobre 2020, à 10h GMT, le cours en bourse du Wit  est coté à 37, 49 dollars et le  Brent à  39,71. Ramené à prix constant, fonction de la cotation euro/dollar,   à la période janvier  2020 le cours du Brent  est  de de  35,73 dollars.  Parallèlement nous aurons   une  hausse de la facture d'importation libellée en euros, devant donc dresser la balance devises L’évolution du cours du Brent, en moyenne annuelle, avec des fluctuations semaine par semaine  mois par  mois, est la suivante de 2000 à  2020 :  2000, 28,52 dollars le baril - 2005, 54,41 - 2010, 78,92 - 2014, 99, 00   -2015, 52,36 - 2016, 43,55 -  2017, 54,25 - 2018, 71,05- 2019, 64,34- estimation fin 2020 en moyenne entre un cours très bas  les quatre premiers mois de 2020( cours environ 30 dollars et moins)  et hypothèse un cours qui dépasse 40 dollars  de juillet à décembre 2020,  nous aurons une moyenne de  35/37 dollars pour le Brent. 

2- Nous aurons plusieurs incidences sur la sphère réelle. Premièrement, sur  le taux de croissance du  produit intérieur brut (PIB)  à prix courants qui   a évolué ainsi de 2000 à 2019 ?  se calculant  par rapport à la période précédente, un taux de croissance élevé en T1 par rapport à un taux de croissance faible en TO donne globalement un taux faible  : - 2000 5,0%-2005, 6,1%- 2010, - 2015,3,7%--  2018, 1,4 %- 2019, 0,8%. Pour les prévisions 2020  nous avons pour l’ONS  un taux de croissance négatif de 3,9% au premier trimestre 2020,  pour le FMI, moyenne 2020  moins 5,0% et pour la Banque mondiale moins 6,4%.   Les données  du PIB en dinars ou dollars à prix  courants peuvent  être trompeuses de plusieurs manières, en particulier lors de comparaisons entre deux ou plusieurs années. D'abord, parce qu'elle peut être gonflée à cause de l'inflation (ou l'inverse à cause de la déflation). C'est pour cette raison que l'on a souvent recours au PIB en dollars constants. Il suffit que la banque d’Algérie dérapage la valeur du dinar par rapport au dollar de X % pour que le PIB  fléchisse  dans la même proportion.

Deuxième impact, sur le taux de  l’emploi  devant tenir compte de la   pression démographique dont la   population a évolué ainsi : 2000, 30,87 millions d’habitants,-2005, 32,90- 2010,  35,97- 2018, 42,57, -2019, 43,4   -2020- 43,9 millions , 51,309 millions en 2030 et 57,625 millions en 2040 avec une La population active en  2006 de  8,86, millions- 2010 10,81- 2016, 11,93- 2018, 12,46  et en  2019, environ 12,80 .  Plus précisément,  la structure de l’emploi, selon le secteur d’activité, fait ressortir un secteur tertiaire  avec la domination du commerce – des services  et de l’administration, le secteur industriel en déclin représentant moins de 6% du PIB  en 2019 et du fait de l’épidémie du coronavirus,  une  décroissance en 2020 selon les données de l’ONS  de septembre 2020... Pour les  retraités, selon le  ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, ils   sont au nombre en mai 2020 de  3.266.000 personnes retraitées et selon le DG du Trésor Public d’ici fin 2020, le déficit de la CNR pourrait atteindre les 700 milliards de dinars. C’est que la CNR  connaît de sévères contraintes où en 2019, seuls 2 personnes sont actives pour 5 retraités. Face à ce constat, l’Exécutif a dû recourir au  financement non conventionnel  où   500 milliards de dinars a été injecté dans la CNR, dont une partie a servi à rembourser la CNAS.

Comme conséquence à la fois de la chute du PIB et et de  croissance démographique , nous assistons à un accroissement du taux de chômage., qui  selon les statistiques internationales  a évolué ainsi en référence à la population active de l’année  2012, 11,0%- 2013, 9,8%- 2014, 10,6%-2015, 11,2%- 2016 10,5%- 2017, 11,6%- 2018, 13,1%- 2019, 14,3%- 2020, 15,0%- et pour 2020/2021 avant la crise -2021, 15,4%  et 2021 15,8% , Si l’on prend les données pour 2019, taux de croissance de  la banque mondiale du 08 juin 2020 –moins 6,4% ( recul 8,4%) celles de la banque africaine de développement de début juillet 2020 – scénario pessimiste moins de -5,4% et modéré -4,4%, et les données de l’ONS de juillet 2020,  de moins 3,9% pour le premier trimestre,   nous aurons un stock additionnel de chômeurs pour 2020 en Algérie qui varierait entre 1.800.000    et 2.000.000. Cela n’est  pas propre à l’Algérie comme le montre le rapport alarmant de l’OIT de mai 2020,  plusieurs centaines  de millions de chômeurs dans le monde, avec un accroissement des inégalités et de la pauvreté,  frappant particulièrement les pays les plus vulnérables.. La sphère informelle représente  selon les données de l’OIT de  juillet  2020, 80% de l’emploi en Afrique servant de tampon social , pourvoyant  par différents mécanismes à la faiblesse de l’offre  .En Algérie cette sphère informelle  représente plus de 50% d l’emploi  et le  ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, courant mai 2020 a révélé que les zones d’ombre  couvre  environ 8,5 millions d’Algériens vivant dans 15 000 zones d’ombre.

3. - Nous aurons  également des  incidences sur la sphère financière. Premièrement,   sur le déficit budgétaire   les prévisions  de la loi de finances complémentaires 2020 qui  se fonde sur le  prix fiscal  de 30 USD  et sur le prix de marché de 35 USD. Le déficit budgétaire devrait atteindre -1.976,9 milliards de dinars, soit -10,4% du Produit intérieur brut (PIB) (contre -1.533,4 milliards de dinars, soit -7, 2% du PIB dans la loi préliminaire). la  balance des paiements enregistrant  un solde négatif de -18,8 milliards de dollars, contre 8,5. Dans ce cadre il faut éviter les utopies de la panacée de la finance islamique, comme moyen de financement, représentant en 2019 moins  de 1% du financement global de l’économie mondiale ( 2500 milliards de dollars sur plus de 260.000  milliards de dollars).  Sa réussite implique des conditions : une visibilité ,la maitrise de l’inflation, la stabilité de la cotation du dinar par rapport aux devises euro et dollar notamment et  surtout de la confiance Etat-citoyens ( voir notre interview mensuel financier Le Capital.fr-Tv France 24 avec l’AFP du 13 aout 2020). 

Deuxièmement  sur le niveau des réserves de change.  Selon le Fonds Monétaire International (FMI), information rapportée le 26 septembre par le site spécialisé, Oil Price , l’Algérie a besoin d’un prix du baril de pétrole estimé à 157,2 dollars pour équilibrer son budget, et non pas 60 dollars comme l’a déclaré récemment le Ministre de l’Energie,  le prix du baril fixé par la loi de finances 2020 n’étant  qu’un  artifice comptable . La précédente projection du FMI pour 2020 prévoyait un prix d’équilibre à 92,3 dollars et cela  suite à la crise COVID19, pour  2021, un prix d’équilibre à 109,3 dollars, rappelant que selon les prévisions du FMI pour les années précédentes, le prix d’équilibre du baril pour l’Algérie était estimé de 104,6 dollars en 2019, à 101,4 dollars en 2018 et à 91,4 en 2017. Il s’ensuit une  baisse drastique des réserves de change qui   ont évolué ainsi :  -2013 : 194,0 milliards de dollars,  - 2018 : 79,88 milliards de dollars - fin  2019 :  62 milliards de dollars, - fin 2020, avant l’épidémie du coronavirus , les prévisions de la   loi de finances complémentaire  sont de  44,2 milliards de dollars contre 51,6 prévu dans la loi initiale  Le FMI pour prévoit   33,8 milliards de  dollars fin 2020,  le trésor français 36 milliards   et fin 2021, début 2022, entre 12/13 milliards de dollars.   Le niveau des réserves de change  dépendra à la fois du cours des hydrocarbures, du niveau des  importations ne pouvant pas tout restreindre, quitte à étouffer  tout l'appareil productif,   du niveau de production interne en  évitant  l'expérience malheureuse des usines de montage de voitures et bon nombre d'autres projets "fictifs", de la   lutte contre les surfacturations et une meilleure gestion interne, les recettes fin 2020 devraient clôturer entre 21/22 milliards de dollars. Il s’agira de ne pas confondre recettes ave profit net  en tenant compte de la forte consommation intérieure qui horizon 2030 risque de dépasser les exportations actuelles., renvoyant à la politique des subventions et de  la  tendances énergétiques au niveau mondial  s’orientant vers un Mix énergétique avec le primat des énergies renouvelables  et de l’hydrogène 2030/2040

Troisième impact sur le taux d’inflation qui influe sur le pouvoir d’achat compressé en Algérie par  les transferts sociaux généralisées et non ciblées qui dépasse les 9% du PIB , dont  l’indice  se calcule par rapport à la période précédente. Ainsi un taux d’inflation  faible en T1 par rapport à un taux d’inflation élevé  par rapport à To  donne cumulé un  taux d’inflation élevé et se pose la question de l’évolution du salaire réel par rapport à ce taux cumulé. Le taux officiel  été selon le site international financier  Index Mundi de 1999 à fin 2019 de  89,5% évoluant ainsi : -2010, 5,0%-2011, 4,5%-2012, 8,9%(après les augmentations de salaires)- 2013, 3,9%-2014, 2,9%- 2015, 4,2%-2016, 5,9%-2017, 5,6%-2018, 5,6%  et 2019, 5,6%. Pour l’Algérie s’impose une révision de l’indice pour tenir compte de l’évolution  des besoins nouveaux, où l’immatériel tend à prendre une proportion croissante et devant impérativement analyser les liens entre croissance, répartition du revenu national et le modèle de consommation par  couches sociales, qui évolue ( un ordinateur et avoir internet sont indispensables) ne puant nous limiter aux biens de subsistances), un indice global ayant peu de signification. La déflation dans les pays développés s’explique par la politique monétaire prudente, le rétrécissement de la demande  et  surtout de la baisse des couts de production notamment venant des pays émergents

Quatrième impact, sur la cotation du dinar où  la valeur  d’une monnaie dépend avant tout  du niveau de la production et de la productivité interne  et la capacité d’un pays à pénétrer  le marché international  et où   l'évolution du cours officiel   du dinar est  fortement corrélé aux réserves de change via les recettes d'hydrocarbures à plus de 70%. Pour la période 2010/2020   - 2010, 74,31 dinars un dollar et 103,49 dinars un euro :   -2015, 100,46 dinars un dollar et 111,44 dinars un euro :  -2016 :100,46 dinars un dollar et 111,44 dinars un euro :  -2017 : 110,96 dinars un dollar  et 125,31 dinars un euro :   - 2018 : 116,62 dinars un  dollar et  137,69 dinars un euro :   -2019 :119,36 dinars un dollar et 133,71 dinars un euro :- 02 octobre 2020 :129,13  dinars un dollar  et 151,31 dinars un euro ( cours Forex).  Tout dérapage du dinar par rapport au dollar et à l'euro permet d'augmenter artificiellement la fiscalité hydrocarbures ( reconversion des exportation hydrocarbures en dinars) et la fiscalité ordinaire( via les importations tant en dollars qu’en euros convertis  en dinar dévalué) , cette dernière accentuant l'inflation  ( équipements, matières premières, biens finaux, montant accentué par la taxe à la douane s'appliquant à la valeur dinar,  étant supportée en fin de  parcours, par le consommateur comme un impôt indirect, l’entreprise ne pouvant supporter ces  mesures que si elle améliore sa productivité. Pour suppléer au déficit budgétaire, le recours à la planche à billets    après l'épuisement du  Fonds de stabilisation du pétrole (FRR) pour financer  le déficit budgétaire,  la Banque Centrale a recouru à ce mécanisme  de  mi-novembre 2017 à avril 2019, ayant  mobilisé 55 milliards de dollars, soit l'équivalent de 32 % du PIB de 2018.  Ce financement , outre l‘effet inflationniste, comme au Venezuela, favorise , contrairement à certains discours, la baisse la baisse des réserves de change puisque en mettant à la disposition de certaines entreprises des dinars, (70% des matières premières et des équipements des entreprises publiques et privées étant importées, le taux d'intégration ne dépassant pas 15/20%), ces dernières se porteront importatrices en devises en biens et services.   En cas de baisse drastique des réserves de change à 10/12 milliards de dollars, qui tiennent la cotation du dinar algérien à plus de 70%,  la banque d'Algérie sera contrainte de dévaluer le dinar officiel à environ 200/220 dinars un euro avec une envolée du cours sur le marché parallèle,  la cotation actuelle sur ce marché n’étant pas  significative du fait de l’épidémie du coronavirus qui limite la demande, étant difficile de combler l'écart avec le marché parallèle , l'allocation de devises tant pour les opérateurs privés que  pour les ménages étant dérisoire.

En conclusion, les actions conjoncturelles ne s’insérant pas  au sein d ‘objectifs stratégiques précis,  au lieu de résoudre la crise l’amplifie  à moyen terme . Aussi, toute  politique  devra tenir compte d’une révision de l’actuelle politise socio- économique, au niveau international notamment de  la demande de révision par l’Algérie de  certaines clauses de l’Accord d’Association avec l’Europe, non pas de l’Accord cadre,  notre principal partenaire , dans le cadre  d’un partenariat gagnant –gagnant , d‘autres zones de libre échange, notamment avec l’Afrique  dont les échanges sont dérisoires, mais, il ne faut  vendre des utopies ,  supposant des entreprises compétitives ( cout/qualité)  et  tenir compte des aspects sécuritaires influant sur le développement , les tensions  géostratégiques en Méditerranée,  au Sahel  et en Libye.   ( voir notre étude IFR Institut Français des Relations Internationales Paris 2011 la coopération Europe Maghreb face aux enjeux géostratégiques et mon  interview  1/3 septembre 2020  à l’AFP/et quotidien El Moudjahid aout 2020 sur la révision de l’Accord)   . Le  XXIème siècle sera dominé par  les  réseaux de la société civile en symbiose avec de nouvelles fonctions des Etats, des entreprises,  et des institutions internationales  avec les défis de la transition  numérique, énergétique  et  la culture  à travers les médias, qui imposeront un changement profond dans les deux prochaines décennies dans les modes d’organisation institutionnelle, d’entreprises, de consommation et nos comportements.  L’Algérie acteur stratégique au niveau de la région, a besoin de paix et de développement loin des mentalités rentières, du fait  des  liens dialectiques entre sécurité et développement,  car toute déstabilisation aurait une  répercussion régionale sur l’espace méditerranéen et africain - interview A.Mebtoul American Herald Tribune USA 2018-  Mais les réformes garantissant la  sécurité  et le développement ne peuvent   provenir que des algériens eux mêmes.   

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