La grogne des travailleurs de la SNVI de Rouïba monte encore. Mardi en fin de matinée, ils étaient des centaines à quitter leurs ateliers, leurs bureaux pour descendre dans la rue à l’appel de l’union locale de l’UGTA, à sa tête le vieux routier du syndicalisme Messaoud. Du coup, la circulation par la route qui traverse la zone industrielle de Rouïba, est bloquée à la circulation pendant toute la matinée. La police anti émeutes a été sollicitée pour intervenir pour repousser les travailleurs dans l’enceinte de l’entreprise.
Une intervention musclée des forces de l’ordre
Une source syndicale a fait état de « dizaines d’interpellations de travailleurs dont certains sont blessés ». Pour Messasoudi de l’union locale de Rouïba, « les travailleurs ne souhaitent pas créer le désordre, ils sont plus que jamais conscients de la situation que vit le pays et s’il sont sortis, dans la rue, c’est parce qu' ils ont le couteau sur la gorge », tente-t-il d’expliquer. Pourquoi les travailleurs de la SNVI sont sortis encore dans la rue ? Dans certaines filiales, la paie du mois de novembre n’est pas encore été versée, explique-t-on.
Lundi soir, les travailleurs étaient informés que le problème doit se régler au plus tard aujourd’hui mardi. Le problème s’est déjà posé le mois dernier. Au niveau de la Direction générale, on explique qu’il s’agit juste d’un problème technique lié à la mise en place d’un nouveau logiciel de la paie. Mais les syndicats refusent d’être dupes et croient que c’est « l’avenir de la SNVI qui se joue en ce moment ». Ils redoutent une privatisation qui est quelque part décidée en haut lieu.
La peur de la privatisation
« Au début Mercédès est venu dans le cadre d’un partenariat, mais on constate qu’il est en train de prendre de l’ampleur et à ce train il va bientôt phagocyter la SNVI » redoute un syndicaliste qui a souhaité garder l’anonymat. Ce dernier, appuie ses propos et ses inquiétudes par les propos qu’avait tenus dernièrement le nouveau directeur de la SNVI. Au cours d’une assemblée générale des travailleurs, le premier responsable de l’entreprise avait dressé un tableau désastreux de l’entreprise tant au plan financier que managérial.
« Une situation intenable » selon ce syndicaliste qui estime l’intervention de l’Etat nécessaire pour la stabilité du pays ». Pourtant, l’état à travers le trésor a injecté des milliards et des milliards pour sauver la SNVI. Résultas des courses, elle se retrouve encore aujourd’hui au bord de la faillite. « C’est vrai, mais ce n’est pas la faute des travailleurs ? C’est la faute des gestionnaires, accuse un syndicaliste. Un cadre de la SNVI qui a requis l’anonymat a eu ces propos qui en disent long sur la situation de cette entreprise : « Je travaille depuis 32 ans à la SNVI, je puis vous dire une chose, si l’Etat nous payait en restant à la maison, l’entreprise serait plus bénéfique, car l’Etat ferait au moins l’économie de la restauration, du transport, des frais de missions à l’étranger pour les dirigeants, mais surtout des vols des pièces détachées ».
Ce responsable, qui ne cache pas son amertume devant cette situation déplore aussi le règne de l’incompétence au niveau des ateliers « la plupart des cadres qui ont des capacités, une expertise sont partis, la formation interne est supprimée et les jeunes qui nous viennent de l’extérieur ont reçu une formation en arabe et ont du mal à s’accrocher ».
Ce cadre qui est à quelques mois de la retraite qu'il attend « vivement » soupire-t-il, n’est pas tendre aussi avec les anciens cadres dirigeants de l’entreprise : « ils ont tous créé aujourd’hui leurs propres entreprises privées sur le dos de la SNVI ». En tous cas, il y a une vraie inquiétude chez les travailleurs, surtout avec l’article 66 de la loi de finances 2016 qui autorise l’ouverture du capital des entreprises publiques au privé ».