Le journal arabophone « Al Ahdath » vient de mettre la clé sous la porte. Conséquence : pas moins de 30 salariés entre journalistes, personnel technique et administratif, qui se retrouvent du jour au lendemain sur le carreau.
Une dizaine d’entre eux ont organisé mardi un rassemblement pour dénoncer la situation dans laquelle ils se trouvent malgré eux. Pénible. C’est la direction, par voie d’affichage, qui a informé que le journal cesserait de paraitre. Ce que les manifestants ont considéré comme un acte de « mépris » de la part de l’administration à qui ils réclament leurs droits.
L’administration, elle-même se dit « contrainte » à faire ce choix douloureux. La raison est toute simple : plus de publicité pour assurer les salaires des travailleurs et payer la facture de l’imprimerie.
Mais ce qui est arrivé aujourd’hui au journal Al Ahdadh va incontestablement toucher dans les prochains jours d’autres journaux arabophones et francophones, créés et maintenus artificiellement pendant des années grâce à la générosité de l’ANEP (agence nationale de publicité) qui leur assure quotidiennement « un minimum publicitaire » pour pouvoir survivre.
Sauf que ces journaux à très faible tirage, ne répondent à aucun projet éditorial et n’ont d’existence que pour capter une page ou deux de publicité de l’ANEP. Mais la crise économique dans laquelle le pays se dépatouille actuellement a touché l’ANEP dont le portefeuille publicitaire s’est drastiquement contracté. Les entreprises publiques, principaux annonceurs de l’ANEP ont toutes réduits leur budget publicitaires, sur instruction du premier ministre.
Pour le peu qui reste comme manne publicitaire, l’ANEP a décidé de faire des choix drastiques de supports en fonction de leur audience et ces « petits journaux », comme on les appelle dans le milieu de la presse sont les premières victimes de la baisse de la manne publicitaire qui touche même les grands journaux qui arrivent néanmoins à tenir le coup, car jouissant d’une certaine aisance financière. Mais pour combien de temps ? La question n’est pas d’ailleurs propore à la presse algérienne, elle est mondiale.
Des grands journaux comme le Monde, Libération, qui sont des institutions en France, confrontés à la baisse des ressources publicitaires ont dû passer sous les fourches caudines des plans sociaux pour pouvoir survivre. Aux USA, un journal comme le New-York Times a été dans l’obligation d’abandonner l’édition papier pour pouvoir équilibrer ses comptes. En Grande-Bretagne, après 30 ans d'existence, The Independent va disparaître des kiosques. Le quotidien britannique arrête son édition papier et passera au 100% numérique à partir du 26 mars, a annoncé son propriétaire, Evgeny Lebedev, vendredi 12 février.
Pour en revenir aux cas de ces journaux algériens sur qui pèse une épée de Damoclès, il est vrai que c’est des centaines d’emplois qui sont en jeu. Mais la crise n’a pas hélas d’état d’âme et on voit mal l’Etat lui-même, enjoint de réduire ses dépenses, à cause de la crise, venir en aide. Fatalement, les salariés seront les premières victimes. Le comble est que la plupart de ces journaux n'ont même pas d'assurances. Finalement, ce sont les patrons de ces journaux, créés artificiellement, pour les besoin d’une cause inavouable, qui s’en sortent sans trop de dommages. Avec les milliards qu’ils ont eu le temps et le loisir d’amasser, par la grâce du colonel Faouzi, grand ordonnateur de la publicité étatique pendant des années, ils peuvent dormir sur leurs deux oreilles en Espagne, destination privilégiée de leurs investissements dans l’immobilier.